Parfois difficile de retrouver l’esprit trail – convivialité, respect de l’environnement, pratique sportive saine – dans des pelotons de pratiquants de plus en plus bougons. L’esprit trail aurait-il disparu ? Tentative (subjective) de réponse…
N’étant pas un grand spécialiste de la discipline, j’avoue que l’existence supposée d’un « Esprit Trail » m’a toujours intrigué. Conjuguée à l’absence d’un « Esprit Route », elle laisserait supposer qu’il existe une caste particulière de runners dotés de valeurs morales et physiques supérieures. Des valeurs dont le dépassement de soi, l’altruisme et le respect de l’autre et de la Nature seraient les fers de lance, regroupés au sein d’une grande famille aimante et soudée.
Il semblerait que cette perspective très angélique ait, cependant, fait long feu et que, depuis quelques temps, les réunions de cette famille trail soient très agitées. C’est ainsi, par lettres ouvertes et coups de gueule via blogs interposés, que l’on découvre des organisateurs d’épreuves critiquer vivement leurs participants (trop sales, trop lents, irrespectueux), des participants critiquer tout aussi vivement leurs organisateurs (trop de monde, trop de ceci, pas assez de cela) mais aussi des critiques critiquant ceux qui critiquent : tous justifiant à l’unisson leurs critiques au nom du respect de l’Esprit Trail.
Il a bon dos l’Esprit Trail ! Courir dans la Nature, humer l’air pur de nos montagnes devraient pourtant rasséréner plutôt qu’agiter les neurones…
Le Trail est à la mode. L’est-il vraiment ? Il l’est ! Nul ne peut le nier. Les chiffres et perspectives de vente des équipementiers parlent d’eux-mêmes. En 2012, dans un marché global en stagnation, le trail se distingue par ses ventes en croissance. Et comme le miel attire les abeilles, le trail attire les participants. Cet afflux de sang neuf aurait pu s’inscrire dans une certaine tradition pionnière, un socle de valeurs, mais vous connaissez comme moi cette loi élémentaire de la physique : plus il y a de liquide, plus on a de dilution. Le socle s’effrite. Sans doute n’était-il pas assez robuste. Fait de sable plutôt que de pierre.
Pas assez robuste en tout cas pour être confronté à la réalité de notre société contemporaine fondée sur l’égocentrisme, le Moi, la revendication du « respect » mais toujours dans le même sens. Les épreuves de trail, de plus en plus fréquentées, sont devenues des victimes, très consentantes, de la Loi des Grands Nombres. Pour faire simple, statistiquement, plus il y a de monde, plus il y a de chance que ce groupe de personnes soit représentatif de la société et de ses travers.
La première pierre pourrait être jetée aux organisateurs d’épreuves qui ont saisi la balle de la croissance au bond sans rechigner, avant d’en mesurer, un peu tard, les conséquences. Mais peut-on leur reprocher de répondre aux attentes pressantes des coureurs ? Par contre, s’il est une critique qu’on peut leur adresser, c’est de continuer à entretenir le mythe…
D’un point de vue plus prosaïque, vous me permettrez de sourire lorsque j’entends parler de respect de la Nature alors qu’on lance des milliers de « piétineurs » à l’assaut des sentiers.
L’organisateur-copain des débuts est devenu un organisateur-prestataire-de-services-aux-clients et cette transition lui est difficile voire insupportable. Le « je paie, j’exige, on me doit » s’érige en leitmotiv du nouveau participant, pour qui le trail n’est qu’une nouvelle façon de se dépenser physiquement à-la-mode ou de flatter son égo. Heureusement, se dit notre organisateur, qu’il reste quelques puristes…
La tentation simple pourrait être de limiter drastiquement le nombre de participants aux compétitions mais outre ses impacts économiques évidents, elle engendrerait une immense frustration que l’augmentation incessante du nombre d’épreuves ne pourrait compenser. Pour ma part, je privilégierais la main tendue.
Il est impératif que les organisateurs s’adaptent à ce nouveau paradigme dont ils sont volontairement ou pas à l’origine et acceptent l’évolution de leur discipline : c’est le prix à payer de la popularité. Qu’ils réfléchissent à proposer des modes de fonctionnement permettant de perpétuer l’esprit tout en offrant des opportunités au plus grand nombre, notamment en déclinant plusieurs parcours aux difficultés différentes et à la Nature plus ou moins domestiquée. Il est aussi impératif qu’ils réussissent là où les organisateurs de course sur route ont échoué : en éduquant les coureurs. Quant aux coureurs, ma foi, si vous savez comment changer notre société en général, faîtes-le moi savoir !
Yannick Hervier dit
très bon article et très juste
Nicolas Bizet dit
ok ben moi je ne fais que du trail je respectel 'environnement je ne jette jamais rien sur les chemins et generalement les personnes qui critiquent sont les bitumeux qui s y essayent . pas assez de ravitallement trops de boux etc…en plus j ai remarque depuis des annees que les bitumeux sont plus tristes trops attaches a leurs chrono le trail c'"est plus festif alors si ca ne leur plait pas qu ils restent sur le bitume moi je n y vais pas
Benoit Axe Andes dit
Excellente synthèse d'un Fred en grande forme…
Marc Sèbe dit
Voilà un bel article qui me semble bien résumer la situation actuelle du trail, une discipline qui a grandi très (trop?) vite!
Manu Lacampagnarde dit
encore un jugement et des clichés….qui montrent bien qu’effectivement les coureurs ne sont que le reflet de notre société….
Fred Brossard Runner Bio dit
Merci à tous les deux. J'ai essayé de ne pas être trop méchant tout en distillant le fond de ma pensée quand même …
Roms on Trail dit
Analyse très pertinente et bien écrite, bravo !
Arlerond Ngan dit
artcile tres pertinent. Oui il faut imperativement que le trail s'adapte à leur popularités croissante. Mais on trouve de tout bien sur ceux qui respectent et qui ont le " bonne esprit" mais voila comme dit Fred, il y a un fait indeniable tous les coureurs ne sont pas respectueux. Et les courses que nous faisons font partis des évènements les plus polluants(que ce soit route ou nature). Bon je vous accordes que en données chiffrés on ne peut trouver que des stats concernant les courses sur routes. Pourquoi pas de données sur les courses de trail?
Johan Martin dit
Belle analyse, très pertinente, bien écrite et surtout très vraie… Mais heureusement le trail ce n'est pas que s’épingler un dossard sur le bide et courir comme un âne. L'esprit du trail ça peut aussi être un dépassement personnel plus qu'une course ou il faut tenir son allure à la seconde prêt.
Beaucoup de courses surf sur la mode trail, et c'est souvent là qu'on retrouve tout les travers que tu cite… mais comme toutes les modes, ça va passer
Jean Charles F dit
Je suis comme Nicolas Bizet, je ne fais que du trail et venant de la rando, je suis un montagnard et donc respecte la nature enfin, je ne m'inscrit pas sur les courses souvent dites mythiques mais plus souvent mercantiles. Maintenant on ne changera pas le monde, jeter ses cochonneries dans la nature, c'est plus un problème d'éducation qu'autre chose, et cela tient plus de la responsabilité individuelle que des organisateurs ( qui en général font plutôt preuve de pédagogie sur ce point, mais est ce leur job?).
Sincèrement je ne vois pas bien ce qu'on peut faire de plus, sinon sensibiliser les plus jeunes qui arriveront sur les courses, que ce soit en nature ou en ville; à chaque passionné de course à pied de développer et montrer un esprit civique, un esprit runner , ça commence par le bonjour, en croisant d'autres runners, même si je me prends souvent des vent, tant pis je persiste, et j'en trouve toujours un qui finit par répondre, comme quoi il y a de l'espoir…
Saida Body Sport dit
SALUT SE SAIDA HAMIDA DE MAMAMMET COURSE SEMI MARATON
Nicolas Decorte dit
Et non je confirme….il m arrive parfois d engager des conversations sur un semi…suis toujours etonne de voir la tete sans expression et sans reponses de certaines il ne faut pas generaliser certes mais sur les trails il y a de l entraide….des echanges de la fraternite et la fete….ce n est pas un cliche mais ce constat est bien reel….d ou ma preference pour les courses natures
Jerome Toscano dit
ha ha….une vision remplie de clichés et d assertions douteuses…il faudrait trailer un peu plus Mr Brossard